L’accueil des bénédictins par Don Sandro
Toujours en soutane, mais revêtu pour la circonstance de tous ses insignes ecclésiastiques, le curé s’adresse à Dom Jehan :
« Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Amen. Qui êtes-vous ? Que cherchez-vous ?
— Nous sommes fils de saint Benoît et sommes venus pour prier et pour travailler, comme nous le commande le Saint Évangile et notre Sainte Règle.
— Notre évêque d’Albenga vous connaît-il ?
— Oui, et il vous demande de nous donner l’hospitalité.
— Ce que le village de saint Michel [i. e. Villatalla] peut vous offrir, c’est un toit, une église et un peu de terre.
— Dieu soit loué ! Et nous prierons Dieu, la Madone et saint Michel pour vous ».
Puis il termine par ces paroles : « Benedictus qui venit in Nomine Domini. Procedamus in Pace ! »
La procession se met alors en marche au chant des litanies, la croix en tête, suivie des enfants de chœur, de la confrérie locale, du clergé et de la petite mais fervente population. Une fois entrés dans l’église dédicacée à saint Michel, Don Sandro s’approche de Dom Jehan et lui remet solennellement la grosse clé de l’église puis le conduit au campanile pour lui faire sonner les cloches en signe de prise de possession.
Suit l’office des vêpres et, en ce jour où la liturgie célèbre le mystère de la Visitation, quand vient le chant du Magnificat, les cœurs mêlent tout uniment leur action de grâce à celle, pure et humble, de la Vierge Immaculée.
Puis, revêtu d’une antique chasuble romaine conservée dans le meuble de la sacristie, le Père Jehan, accompagné du diacre et du sous-diacre, monte à l’autel pour y chanter la sainte messe selon le rite antique et traditionnel.
Au cours de l’homélie, Don Sandro rappelle la reconnaissance immortelle des liguriens envers les fils de saint Benoît qui ont apporté au pays la culture de l’olivier peuplant ses vallées et ses collines et qui, par la qualité de son huile, l’a rendu célèbre dans le monde entier. C’est donc œuvre de justice et de piété, explique-t-il, que d’accueillir parmi nous les fils spirituels de nos bienfaiteurs.
À son tour, le Père Jehan, après avoir expliqué l’essentiel de la vie monastique ordonnée à la vie intérieure par le moyen de la prière et du travail, témoigne de toute la gratitude qui déborde son cœur. D’abord envers Mgr Oliveri, qui le reçoit dans le diocèse d’Albenga-Imperia sous sa responsabilité pastorale (voir lettre d’accueil du 6 février). Puis à l’égard de Don Marco Cuneo, archiprêtre d’Artallo et chanoine de la cathédrale d’Imperia, qui fut le puissant et intelligent ambassadeur de la cause bénédictine traditionnelle et l’ami des premiers instants. À l’égard aussi de Don Sandro, qui est le grand réalisateur, charitable, silencieux et efficace de l’implantation monastique à Villatalla : sans lui, le soleil n’aurait pas tant brillé ce jour-là dans les cœurs. À l’égard enfin des fidèles de la paroisse dont certains sont déjà de généreux bienfaiteurs, mais qui tous ont manifesté aux moines la bienveillance et la charité du sourire et aussi la joie de recevoir parmi eux des âmes vouées à la prière et à l’adoration.
À l’issue de la cérémonie, à l’ombre des arbres qui jouxtent l’église, un rafraîchissement, avec les traditionnels toasts de pizzas préparés et offerts par les villageoises, fut l’occasion de faire plus ample connaissance.
Le Frère Ansgar Santogrossi quittera Villatalla le 14 juillet pour visiter sa tante dans les Abbruzzes d’où sa famille est originaire. Il se rendra ensuite au séminaire de la Fraternité Saint-Pierre à Denton (Our Lady of Guadalupe), aux USA, où il s’est engagé à donner des cours de théologie. Sans doute reviendra-t-il en Italie après l’année scolaire.